La matrice d’Eisenhower ou matrice des priorités est un incontournable de la gestion du temps. Si elle est simple à comprendre, son application au quotidien demeure un défi. On vous explique.
1. Matrice d’Eisenhower : comment définir les urgences vraiment importantes ?
C’est le cadran de l’adrénaline. Il faut agir immédiatement et vite ! Certes. C’est indiscutable. Oui, mais… Avons-nous vraiment toujours affaire à de vraies urgences vraiment importantes ? Pour le savoir, posons nous 3 séries de questions :
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- L’action à réaliser a-t-elle un impact majeur sur la satisfaction client ? sur la santé financière de l’entreprise ? sur son image ? sur les obligations légales qu’elle doit remplir ?
- Quel est le risque à ne pas réaliser cette action immédiatement ? Y a-t-il un risque sur la sécurité des personnes ? Un risque de perte de clientèle ? Un risque financier ? Juridique ? Que devient ce risque si l’action est réalisée la semaine prochaine plutôt qu’aujourd’hui ? Dans 2 jours ? Demain ? Dans deux heures ou même une heure ?
- Enfin, quelle est notre part de responsabilité dans l’accumulation de tâches en cadran A ? Quelles sont celles que nous aurions pu anticiper ?
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Les réponses à ces questions peuvent nous redonner un peu de marge de manœuvre pour arbitrer en faveur d’une tâche de cadran B moins urgente mais à plus fort enjeu. Sinon, nous risquons de tomber dans le cercle vicieux de la matrice emballée : les tâches de cadran B sont continuellement reportées et traitées au pied du mur, en cadran A.
2. Comment planifier les tâches du cadran B selon la matrice d’Eisenhower ?
Les tâches du cadran B méritent toute notre attention, car elles sont importantes mais moins urgentes. C’est en les anticipant que nous redonnons de la souplesse à notre agenda – et gagnons en sérénité. Or, ce sont souvent des tâches délicates ou des problèmes complexes qui méritent un temps réflexion long, peu compatible avec des urgences qui tombent à rythme soutenu. Voici une liste de bonnes pratiques pour les privilégier et les protéger :
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- Découper les tâches longues en sous-objectifs susceptibles de tenir dans un format court : 45′ à 1h30 maximum.
- Planifier dans l’agenda des rendez-vous avec nous-mêmes pour les traiter, de préférence le matin avant d’ouvrir la boîte mail.
- Indiquer en clair l’objectif de chaque séquence sous forme de livrable concret.
- Fermer mail, téléphone et indiquer aux collègues que nous devons nous concentrer.
- Si possible, télétravailler ou s’isoler dans une petite salle à dispositions.
- Et bien sûr, résister à l’invasion des tâches du cadran C.
3. Le défi du cadran C : ne pas se laisser envahir !
C’est sans doute le plus grand défi de cette matrice, celle qui trace la « diagonale du fou » B-C. Elle représente notre plus gros dilemme : faut-il privilégier une urgence moins importante à une tâche importante mais moins urgente ? La réponse est non. Intellectuellement, nous le comprenons.
Psychiquement et presque physiologiquement, c’est une autre affaire. La notion d’urgence déclenche le réflexe irrépressible de tout lâcher pour nous en occuper. D’où l’importance de nous isoler pour protéger nos tâches de cadran B.
Pour résister à l’envahisseur, nous pouvons aussi adopter d’autres réflexes :
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- Répondre à toute sollicitation par « oui et ». Extrait de dialogue : « je peux te voir 5 minutes ? » – « oui bien sûr, à 11h ». Le bénéfice de cette méthode est immédiat. Entendant le oui, le solliciteur est rassuré. Il accepte dans 80 % des cas de reporter notre entretien… lorsque nous aurons fini cette tâche de cadran B en cours.
- Réserver systématiquement dans l’agenda des plages de disponibilité – une à deux par jour – pour canaliser lesdites sollicitations et traiter les vraies urgences en toute sérénité.
- À chaque nouvelle demande, nous interroger : « qui d’autre ? » pourrait réaliser cette tâche mieux et plus rapidement ?
- Oser refuser tout simplement avec un « non je ne peux pas » les tâches qui sont vraiment trop en marge de notre mission.
- Négocier le périmètre du livrable à fournir, redonner au solliciteur une part du travail à accomplir.
- Rappeler gentiment les règles du travail collectif à ceux qui n’anticipent jamais…et négocier encore plus durement avec eux.
- Traiter en profondeur les urgences récurrentes : inscrire dans le cadran B, par exemple, de mettre à la disposition des collègues un tutoriel pour qu’ils soient autonomes.
Évidemment, ça ne marche pas à tous les coups. Mais cela permet d’alléger considérablement le poids du cadran C au profit du cadran B.
4. La matrice d’Eisenhower laisse-t-elle du temps pour les tâches du cadran D ?
Le général Eisenhower jetait sans état d’âme tout le contenu de ce cadran à la poubelle. Mais dans le monde professionnel d’aujourd’hui, une partie des tâches du cadran D sont nécessaires mais sans contribution directe à notre cœur de mission. Ce sont les tâches administratives, les notes de frais, le classement de nos dossiers. Sans réelle valeur ajoutée, elles méritent tout de même d’être réalisées avec régularité. Il est plus rapide de traiter les notes de frais d’une semaine que d’un mois entier. Si nous ne classons pas nos fichiers, nous perdons chaque jour un nombre de plus en plus important de minutes à retrouver nos dossiers.
Le cadran D contient également une foule de petites tâches mineures et complètement accessoires dont nous pourrions nous passer mais qui nous font du bien. Quelques tweets superflus, une partie de ping-pong-sms débridée, un petit service à rendre à une personne que nous apprécions beaucoup, l’ultime peaufinage d’une présentation déjà magnifique… chacun ses marottes. Ces actions nous détendent et méritent à ce titre une place – raisonnable – dans notre emploi du temps.
Pour les tâches du cadran D, deux garde-fous :
Réserver ces tâches pour les « heures creuses » de notre rythme chronobiologique.
Nous donner un temps limité pour les accomplir.
La matrice des priorités n’est pas ingrate. Elle nous entraine dans le cercle vertueux de l’efficacité dès lors que nous relevons ces 4 défis.